Mars Express — Jérémie Périn

Résumé :
« En l’an 2200, Aline Ruby, détective privée obstinée, et Carlos Rivera son partenaire androïde, sont embauchés par un riche homme d’affaires afin de capturer sur Terre une célèbre hackeuse. De retour sur Mars, une nouvelle affaire va les conduire à s’aventurer dans les entrailles de Noctis, la capitale martienne, à la recherche de JunChow, une étudiante en cybernétique disparue. »

Fiche technique :
Réalisateurs : Jérémie Périn
Scénaristes : Jérémie Périn, Laurent Sarfati
Acteurs principaux : Léa Drucker, Daniel Njo Lobé, Mathieu Amalric

Un film que j’attendais avec une impatience folle et… que je n’ai pas pu voir au cinéma… En effet, j’ai une salle Pathé à 500 m de chez moi et elle ne diffusait pas le film. En fait, la salle Pathé la plus proche diffusant le film était à une heure de chez moi. Deux heures de trajets, plus les horaires des séances, n’étaient pas compatibles avec mon emploi du temps du moment. Pourquoi ne pas aller dans un UGC alors ? Mes expériences avec les salles UGC ont toujours été catastrophiques. Mauvais son, qualité d’image pas terrible et surtout les salles les plus crades que j’ai vues. Alors oui, la dernière fois, c’était il y a quinze ans, mais ça m’a vacciné. Pour compenser, j’ai précommandé le Bluray dès que celui-ci a été mis en précommande.

Le film commence avec une scène typique du cyberpunk mélangeant action, piratage et poursuite alors qu’Aline et Carlos sont sur Terre pour arrêter la hackeuse Roberta Williams. Alors qu’ils la ramènent sur Mars, ils apprennent que le mandat « n’existe plus ». On découvre alors que les protagonistes travaillent comme détective pour une mégacorporation dirigée par Chris Roy Jacker, leur ancien frère d’armes. Une nouvelle enquête est alors confiée au duo : retrouver une étudiante en cybernétique qui, comme sa colocataire, a disparu de leur appartement. Aline et Carlos vont devoir s’aventurer jusqu’aux bas-fonds de Noctis (Noctis Labyrinthus), l’établissement terrien principal de Mars créé grâce aux progrès de la robotique, et où humains, robots et androïdes semblent vivre en harmonie.

L’histoire reprend, dans un cadre martien, les tropes du cyberpunk et de la « science-fiction » robotique. On retrouve les mégacorporations, les personnages aux vies « compliquées », les trahisons, des « lois de la robotique », le questionnement sur la place des robots/IA et même une petite pincée de biopunk. Tous ces tropes sont merveilleusement combinés pour offrir un univers cohérent et très plaisant sans jamais se reposer sur leurs inspirations (Robocop, Terminator 2, Ghost in the Shell…) et références. La fin, ouverte, est surprenante et intelligente, car la conspiration de la mégacorporation, même si elle a été doublée d’un plan des IA/robots, aura potentiellement réussi. Alors que lesdites IA/robots se tracent un nouveau destin. Enfin, comme souvent, le fait d’avoir des créateurs qui assument de ne pas avoir une fin heureuse et acceptent de sacrifier des personnages importants est toujours quelque chose que j’apprécie. Le rapport entre Aline, et ses problèmes d’alcool, et Carlos, mort et ramené à la vie dans un corps robotique, mais refusant d’abandonner son humanité, est bien plus profond qu’il n’y parait. Les dialogues sont quasiment parfaits, finement ciselés et porteurs de sens tout en nous offrant des moments d’ironie et d’humour noir bien dosé. On se rend progressivement compte que la Mars des années 2200 sous ces airs de monde de progrès est un enfer pour toute une partie de sa population, ce qui ne change pas tant que ça de la terre des années 2020.

Visuellement, « Mars Express » est franchement brillant. Le style graphique semi-réaliste et la direction arctique globale sont très réussis. On pensera rapidement à « Le sommet de dieux » notamment sur le DA des personnages et c’est normal puisque Mikael Robert œuvre sur les deux films. Les animations, mêlant 2D et 3D, sont superbement intégrées et très qualitatives. Le fait d’utiliser des robots modélisés et animés en 3D et d’avoir des personnages humains entièrement en 2D accentue le contraste entre les deux « espèces » tout en renforçant le flou pour des cas comme celui de Carlos, humain, devenu synthétique. Le travail de design sur l’ensemble de l’univers est magistral. Character design, costumes/tenues, véhicules, robots, augmentés, « biologiques », vaisseaux… le travail est superbe, efficace, stylé et cohérent. Me voilà en train de vérifier, s’il existe un artbook. La réponse est non, mais je découvre l’existence d’un roman-préquel : « Mars Express — TEM », qui pourrait bien finir dans ma PAL.

La réalisation est d’une efficacité redoutable et rappellera par moment des chefs-d’œuvre comme les « Ghost in the shell » de Mamoru Oshii par le sens du rythme, du cadrage et de la mise en scène.

Film au carrefour des genres (film noir, cyberpunk, SF robotique, biopunk) et des références (Asimov, Blade Runner, Ghost in the Shel, Robocop, Terminator 2…), « Mars Express » nous offre une histoire passionnante portée par une réalisation millimétrée, un sens du rythme redoutable, une technique superbe et une direction artistique aux petits oignons. S’ils convoquent de nombreux tropes, références et inspirations, Jérémie Périn et Laurent Sarfati nous offrent un univers solide et passionnant que j’aimerais vraiment voir explorer dans d’autres histoires. « Mars Express » est un très grand film d’animation et de science-fiction.

Laisser un commentaire