Voyage — Stephen Baxter

Résumé :
« 1969 : Neil Armstrong fait, au nom de l’humanité, un premier pas sur la lune. C’est l’apogée du programme spatial américain, un grand moment de l’histoire contemporaine. Mais quand Kennedy survit à sa tentative d’assassinat, tout bascule. Sous l’aiguillon de son adversaire politique, Nixon va pousser la NASA à atteindre un nouvel objectif encore plus spectaculaire : la conquête de Mars. Natalie York est géologue, passionnée par la planète rouge au point d’y consacrer sa vie. Ralph Gershon, un pilote, rêve d’aller dans les étoiles. Pour être de ce voyage, ils seront prêts à tout sacrifier. Et c’est bien ce qu’on exigera d’eux… »

Fiche technique :
Auteur : Stephen Baxter
Éditeur : J’ai lu
Pagination : 509 et 347 pages

Voyage est un livre de hard-SF et une uchronie de l’auteur britannique Stephen Baxter qui fait partie de la trilogie « NASA » qui se compose de « Voyage », « Titan » et « Poussière de Lune ». « Voyage » m’attirait par son aspect uchronique et son parti pris réaliste sur la conquête spatiale. Bien que « NASA » soit une trilogie, les trois livres n’ont pas de liens entre eux en dehors de leur thématique. Je n’ai pas prévu de lire « Titan » et « Poussière de Lune » dont les synopsis me paraissent annoncer des histoires bien moins plausibles et intéressantes.

Le point de divergence de cette uchronie se situe le 22 novembre 1963 : John Kennedy survit à l’attentat de Dallas, contrairement à son épouse, et devient une gêne pour son successeur Richard Nixon. JFK continue de pousser publiquement pour que les USA poursuivent les missions habitées d’exploration du système solaire alors que Nixon doit aussi composer avec le bourbier vietnamien.

Le livre alterne les points de vue et les formes de narration. Principalement écrit de manière romancée, il y a aussi des passages épistolaires où le lecteur a accès à des rapports et documents du gouvernement. Les passages romancés nous donnent à suivre un grand nombre de personnages, principalement des astronautes et des administrateurs de la NASA. On suit ainsi, en alternance, la mission ARES vers mars dans les années 1980, le parcours de la géologue Natalie York pour devenir astronaute, la programme de fusée nucléaire NERVA, les batailles administratives et politiques autour du programme spatiales.

En dehors d’un certain nombre de personnages historiques, Baxter utilise beaucoup de personnages fictifs, principalement (essentiellement ?) du côté des astronautes et des administrateurs de la NASA, même si certains semblent inspirés de personnages réels. Si cela n’est pas particulièrement gênant à la lecture, car tous sont plausibles et certains sont vraiment réussis, l’usage de plus de personnages historiques aurait renforcé l’historicité de cette uchronie. Le programme spatial uchronique développé dans le livre s’avère être très plausible. Le livre s’ouvre d’ailleurs sur des schémas décrivant l’assemblage et le fonctionnement du « vaisseau » ARES. Le programme spatial américain et l’exploration humaine du système solaire sont grandement chamboulés pour le meilleur et pour le pire. En effet, la NASA n’ayant pas un budget illimité, le programme ARES, comme le programme Apollo en son temps, vampirise tous les budgets. Ainsi, les programmes de sondes automatisées, qui dans notre continuum ont permis de grandes découvertes, sont quasiment tous abandonnés (Viking, Pioneer Venus, Mariner 10, Pioneer 10 et 11, Voyager…) à part s’ils peuvent servir à la mission ARES. D’un point de vue uchronique, c’est très intéressant et plausible, mais avec pour conséquence que : poser un humain sur Mars en 1985/86 a pour conséquence que l’on connait beaucoup bien notre système solaire. Me documentant moi-même sur ces sujets pour des projets personnels, il s’avère que le programme spatial développé par Stephen Baxter est totalement plausible et basé sur de vrais projets avortés. Via les personnages historiques, l’auteur nous rappelle aussi à quel point les Allemands ont été importants (voir indispensables) au programme spatial américain, d’abord en mentionnant l’inévitable Wernher von Braun puis son successeur fictifs « Hans Udet » (basé sur Arthur Rudolph), le tout ayant donc des liens avec les crimes de l’Allemagne nazie.

Aussi, malgré un aspect scientifique et technique très présent, certains des personnages ainsi que des situations se sont avérés être vraiment très touchants, je pense notamment au destin tragique de Ben Priest. Le personnage de Natalie York est très intéressant, initialement, elle n’est que la petite amie d’un gars bossant sur le programme NERVA, mais on va suivre sa relation de couple assez merdique ainsi que son intérêt de plus en plus fort pour Mars. Natalie est une femme intelligente, bosseuse, cynique et très résolue, mais aussi très touchante. Surtout, son point de vue de civile au milieu d’astronautes issues des rangs de l’US Air Force, apporte de la normalité et de l’humanité tant pour le lecteur que pour l’américain moyen qui va finalement à nouveau se passionner pour l’exploration spatiale.

« Voyage » de Stephen Baxter est un livre prenant et passionnant pour tout amateur d’uchronie plausible ayant un lien avec l’exploration spatiale. Baxter arrive à nous offrir un haut niveau de plausibilité sur de nombreux aspects : politique, économique, technique… Sans oublier l’aspect humain : drame personnel, doute, évolution des personnages, carrières brisées. On peut aussi compter sur une touche occasionnelle de « Sens of Wonder » réaliste autour de Venus et de Mars. Seul point de regret : le remplacement parfois superflu de personnages historiques par des personnages fictifs. « Voyage » mériterait franchement d’être adapté en série TV.

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