L’abomination de Dunwich — Gou Tanabe (Tome 2)

Résumé :
« Toute naissance n’est pas une bénédiction… Dunwich, village en déliquescence aux confins de la Nouvelle-Angleterre, fait l’objet de nombreuses rumeurs. On dit que les cercles de monolithes au sommet de ses collines étaient jadis le théâtre de rites terrifiants… En 1913, la naissance de Wilbur est un mystère de plus sur cette terre maudite. Sa mère est une albinos aux airs de sorcière, et l’identité du père est tenue secrète par le patriarche Whateley, qui assure qu’il s’agit d’un être supérieur, différent de tout ce qu’il connaît… »

Fiche technique :
Adaptation et dessin : Gou Tanabe
Éditeur : Ki-oon
Pagination : 215 pages

J’avais été très content de ma lecture du tome 1 de cette adaptation qui arrivait à traiter et dynamiser toute la partie du texte d’origine qui expose la dégénérescence qui grouille à Dunwich. Autant dire que j’avais hâte de lire ce deuxième tome.

Il s’avère qu’au final, je ressors de cette lecture avec une déception non négligeable. J’attendais de ce tome qu’il traite de manière toujours aussi dynamique et efficace les tentatives de Wilbur Whateley pour se procurer la traduction latine du Necronomicon, le destin tragique qu’il rencontre dans ses tentatives, puis le déchainement de violence qui frappe Dunwich lorsque la créature que les Whateley « élevaient » allait finir par se libérer de son « clapier ». Sauf que là où le tome 1 condensait et dynamisait les parties les plus « chiantes » du texte original, ici Gou Tanabe me fait l’impression de casser le rythme et de diluer certains points de l’intrigue. L’exemple le plus flagrant à mes yeux est les premières attaques nocturnes de la créature qui aboutissent à la mort dramatique de la famille Frye. Cela constitue environ 80 lignes dans la nouvelle d’origine, mais plus de 30 pages dans l’adaptation de Tanabe. Là où le texte d’origine constate le drame, l’adaptation nous le livre de manière plus intime et détaillée, mais le lecteur qui connait déjà l’histoire (comme moi) risque de trouver cette trentaine de pages un peu longues.

Ces pages nous amènent au dernier écueil de ce deuxième tome : ce n’est pas le dernier. Oui, une nouvelle qui faisait moins de 30 pages à l’époque de Weird Tales, n’est pas complète après plus de 400 pages dans son adaptation manga… Il va donc falloir un troisième tome pour traiter ce qui correspond au dernier tiers de la nouvelle. Cela m’inquiète potentiellement, car je pressens deux options pour ce troisième tome. La première est l’utilisation d’une centaine de pages pour boucler l’histoire et d’utiliser une centaine de pages pour glisser des adaptations de textes cours et mineurs qu’aurait adaptés Tanabe. La seconde, la pire selon moi, serait que ce dernier tiers de l’histoire soit étalé sur 200 pages.

Pour ce qui est de l’aspect visuel, Gou Tanabe est fidèle à lui-même. C’est extrêmement riche et détaillé. Le rendu des empreintes laissées par la créature déchainée, le bétail supplicié par elle… cela est superbement rendu. Plus paradoxale, si la partie sur le drame de la famille Frye me parait artificiellement longue, elle est, malgré tout, l’occasion d’une double-page superbe (les deux dernières pages en fait), où la forme de la créature, invisible, flotte au milieu des ruines de la maison. J’ai aussi un problème avec la représentation de la « forme adulte » de Wilbur (en âge humain il n’a que 10-12 ans). L’aspect caprin et bestial est beaucoup trop fort à mon goût. C’était déjà limite lorsqu’il était « enfant », mais là, je ne vois pas comment une personne avec une telle apparence pourrait circuler sans être arrêté ou victime de violences gratuites dans les 1920-1930. Toujours pour Wilbur, mais cette fois-ci lors de sa mort, lorsqu’Armitage et ses compagnons, constatent les difformités du corps du jeune homme, là aussi la vision et la représentation qu’en fait Gou Tanabe, me paraissent exagérées. Je ne vois juste pas comment, dans cet état, il aurait pu se faire, ne serait-ce que vaguement, passer pour un « humanoïde, se déplacer, tenir et feuilleter un livre, prendre des notes.

Après un premier tome qui gommait la plupart des défauts de la première partie du texte d’origine, ce deuxième tome me semble au contraire accentuer les défauts de l’œuvre d’H.P Lovecraft. Pire, une adaptation que tout le monde attendait en deux tomes sera finalement en trois, faisant peser le risque d’un étalement très artificiel et potentiellement pénible du dernier tiers de l’intrigue qui accentuerait encore certaines impressions de longueurs que porte ce tome deux.

Vous pouvez découvrir l’avis de Blondin, bien différent du mien, sur L’étagère imaginaire.

2 commentaires sur “L’abomination de Dunwich — Gou Tanabe (Tome 2)

  1. Merci pour le lien. Le fait que tu aies lu la nouvelle et pas moi change probablement la perception du tome. Je n’avais pas d’attendu particulier mais ai pu apprécier la maîtrise des codes de l’horreur tout à fait jouissive. Sur le découpage en trois tomes en revanche je te rejoins, je ne vois pas ce qui peut le justifier (je n’ai pas regardé la tomaison japonaise, peut-être que Ki-oon s’est contenté de suivre l’original).

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