La Ligue des Écrivaines Extraordinaires — Collectif

Présentation :

« Dracula, Frankenstein, la Momie, le Loup-Garou, Carmilla… vous pensiez qu’il s’agissait de noms inventés sur le papier, une erreur vous fut presque fatale, humains crédules !
Hélas pour les créatures de la nuit, des femmes ont surgi de l’ombre afin de ranimer la lumière et sauver l’univers : la Ligue des Ecrivainnes Extraordinaires, le secret le mieux gardé depuis des siècles ! Signez d’une goutte de sang et vous apprendrez la vérité. »

Fiche technique :

Autrices : Bénédicte Coudière, Cat Merry Lishi, Marianne Ciaudo, Elisabeth Ebory, Nelly Chadour
Éditeur : Les saisons de l’étrange
Pagination : environ 100 pages par tome
Prix : 12 € par tome

La Ligue des Écrivaines Extraordinaires est un projet qui est né via la plateforme de crowdfunding Ulule et dirigé par Les saisons de l’étrange. J’ai été d’abord intéressé, car une fois les 5 tomes initiaux financés il était possible de financer 3 livres supplémentaires dont « Virginia Woolf contre Rhan-Tegoth » écrit par ma camarade Sushina Lagouje. Mais finalement c’est le projet dans sa globalité qui m’a séduit. Des grandes autrices héroïnes d’aventure où elles font face à des monstres mythiques de la littérature horreur/fantastique, le tout écrit exclusivement pas des femmes. Mon seul regret est que le palier permettant de financer les trois livres supplémentaires n’a pas été atteint, mais a priori il y aura une saison deux incluant ces trois livres. J’ai aussi beaucoup aimé la direction artistique appliquée aux couvertures, au coffret et à la campagne de communication. Enfin passer par le crowdfunding m’a permis de faire une affaire puisque le coffret avec 5 livres ne m’a coûté que 35 €.

Je présente les tomes dans l’ordre de ma lecture.

Ann Radcliffe contre Dracula — Bénédicte Coudière

« Une lettre a suffi pour ranimer le cauchemar de Miss Ann Ward lors de ses aventures dans la Ville-Vampire. À Londres, devenue Mrs Radcliffe et écrivaine respectée, elle coule des jours heureux auprès de son époux et éditeur quand elle reçoit l’invitation à un bal donné en son honneur. Ann ne doute pas que la signature de son admirateur cache un défi mortel, mais il faudrait plus qu’une menace sanglante pour l’empêcher de boucler ses bagages en direction du château des Carpates, bien décidée à mettre hors de nuire ce malfaisant de la nuit. »

Une histoire sans prise de tête, mais intéressante qui met donc en avant une héroïne et aussi un personnage d’une catégorie de « seconds rangs », voire inexistants, dans d’autres œuvres. J’ai bien aimé le « chat » et le fait que l’autrice évite de nous étaler le long trajet à travers l’Europe pour faire des pages qui meublent. Elle va droit au but et c’est une bonne chose. Seul bémol, j’ai du mal à croire que deux femmes puissent rester enfermées dans un carrosse pendant des jours sans s’adresser la parole.

Mary Shelley contre Frankenstein — Cat Merry Lishi

« Lorsqu’elle entama la rédaction de Frankenstein, le Prométhée délivré, Mary Shelley n’imaginait pas que, parmi les contes d’horreur racontés par Shelley, Byron, Polidori et elle au bord du lac Léman, celui qui l’inspirait était véridique. Quand elle l’apprend, sans pouvoir révéler au monde la réalité de la menace, Mary se résout à lutter seule pour préserver les siens des perversités du scientifique et de sa créature. Sa détermination de femme libre et ses connaissances lui donneront toutes les audaces face aux cruautés du monstre. »

Je ne savais pas grand-chose de Mary Shelley, mise à part qu’elle est l’autrice de Frankenstein ou le Prométhée moderne. L’histoire de Cat Merry Lishi s’appuie sur la vie tragique de Shelley et se déroule lors de la période de sa vie où elle vivait en Toscane avec Percy Shelley et Claire Clairmont. Elle est enceinte de son troisième enfant, les deux premiers étant morts. Comme l’indique le titre elle est confronté au monstre dont elle a raconté l’histoire, je me suis demandé comment Cat Merry Lishi allait expliquer le fait que le monstre de Frankenstein, personnage de fiction, devient une réalité. Plus j’avançais dans le récit, plus je trouvais cet élément du récit franchement casse-gueule. Finalement l’autrice retombe sur ses pattes dans les dix dernières pages du récit. Mais ces dernières pages restent problématiques pour moi, car la fin du récit est expédiée de manière incroyablement rapide et plutôt abrupte. Dernier détail, ce roman pêche un peu niveau relecture. J’ai constaté des énormes fautes de français en deux pages et il y a quelques phrases dont la tournure est à la limite du compréhensible (et c’est un auteur autoédité qui dit ça). Cette histoire reste divertissante, et si vous ne connaissez pas la vie de Mary Shelley, c’est un bon moyen de découvrir un pan de sa vie tout en se divertissant.

Jane Austen contre le loup-garou — Marianne Ciaudo

« Rythmé par les sermons dominicaux de son père, le quotidien de Jane a l’aspect bien réglé d’une feuille à musique entre les visites de la gentry et les célébrations saisonnières. Quand les moissons s’achèvent, la petite ville de Steventon se préparerait à s’endormir pour l’hiver si la découverte d’une enfant à demi dévorée ne bouleversait pas la population. Un veuf éploré reprenant pied en société, une bonne muette qui aurait des choses à dire, l’arrivée d’un étranger, des chiens errants et une sorcière dans les bois, les détails s’accumulent hors de l’ordinaire et bousculent les habitudes épistolaires de l’écrivaine. Un deuxième cadavre rongé l’obligera à quitter sa plume pour agir. »

Quelques ponctuations et découpages étranges m’ont perturbé. Je ne sais pas si cela relève de la simple erreur, ou d’un bug dans le fichier qui aurait dispersé quelques éléments, mais si ajoute aussi plusieurs mots manquant en l’espace de quelques paragraphes et deux ou trois phrases dont j’ai eu du mal à saisir le sens. Ce livre pêche un peu dans la relecture à mon avis. Le découpage est par moment maladroit, glissant une ellipse d’une ligne à l’autre sans coupure réelle. Malgré ses nombreux petits défauts l’histoire est intéressante, plutôt plaisante et plutôt bien menée, même si j’ai trouvé la fin assez abrupte, car menée en seulement 5 pages.

Ann Radcliffe, Jane Austen & Marry Shelley contre Carmilla – Élisabeth Ebory

« Depuis l’au-delà que Jeanne-Marie Leprince de Beaumont hante, le projet incroyable de la conteuse est une réussite. En leur révélant leurs aptitudes à penser et agir sur l’univers, elle a éveillé les consciences engourdies des femmes : la Ligue des Écrivaines Extraordinaires est née. Mais la liberté pèse, Ann Radcliffe en ressent le poids des responsabilités sur ses articulations vieillissantes dans la diligence qui l’emporte vers Mary Shelley, éprouvée par les morts de ses enfants et au désespoir après la noyade de Percy, son amour. L’esprit acéré de Jane Austen l’accompagne heureusement pour convaincre la jeune veuve que seule leur alliance vaincra l’abominable Carmilla. »

Au premier abord j’ai craint de faire face à un texte totalement prévisible. Il réserve quelques surprises et surtout les motivations de Carmilla sont bien moins manichéennes que ce que je redoutais et c’est vraiment bien trouver. Le livre réussi aussi le petit tour de force de rassembler un sacré casting ; Radcliff, Austen, Shelley, Lord Byron, Carmilla, un mage noir, des nones guerrières… Arrivé à ce stade de ma lecture, c’est le meilleur des textes de ce coffret. Le moins manichéen, le plus équilibré en terme de découpages.

Anne, Emily & Charlotte Brontë contre la Momie — Nelly Chadour

« La renommée enfin à portée de main, les trois sœurs se réjouissent de la publication de leurs romans. À Londres, les éditeurs leur font la cour et les invitent à rencontrer la société littéraire en s’imprégnant de culture — n’est-ce pas dans la capitale qu’elle domine et rayonne, grâce aux découvertes dans tout l’Empire colonial britannique de la reine Victoria ? Au muséum, le public se passionne pour les mystères de l’égyptologie, la nouvelle science antique dont la momie est sans conteste le phénomène le plus fascinant. On chuchote sous le manteau que les savants dissimulent de sombres histoires à son propos, aux détails macabres… »

Une nouvelle qui m’aura permis de découvrir les sœurs Brontë et de passer un bon moment dans une aventure de type « La momie », mais sans l’humour potache. J’ai senti venir deux ou trois trucs, mais j’ai eu aussi une ou deux bonnes surprises et enfin l’autrice n’a pas eu peur de pousser le « délire » Égypte antique jusqu’au bout ce qui permet à ce texte de se distinguer des autres histoires à base de momies et divinités égyptiennes. Il y a aussi une bonne astuce scénaristique sur un point précis que je vous laisserais découvrir. Je me demande juste si la cause de la brume étrange qui habille Londres durant le récit est bien celle que je pense. Seul hic, la page 87 nous gratifie d’un improbable « pliqsdfgs » révélant encore une fois d’un problème de relecture.

Globalement des lectures agréables et surtout de la découverte. Mes goûts littéraires font qu’en dehors de leurs noms je ne connais pas grand-chose des écrivaines transformé en héroïnes. Pires, les contes pour enfant tels que « La Belle et la Bête » sont tellement associés à Disney que je ne savais même pas qui était Jeanne-Marie Leprince de Beaumont. Les textes sont agréables et divertissants, le tout sans jamais être prétentieux. Les histoires sont courtes, leurs découpages les rends très feuilletonnante. Idéale pour les poses et les trajets en transport en commun. Les couvertures et le coffret sont superbes. Ce dernier est toutefois un peu trop étroit pour recevoir les cinq ouvrages. C’est dommage. Enfin, à 12 € par tomes il est nettement plus rentable d’avoir participé au crowdfunding. Dernier défaut, la relecture qui est un peu limite et donne un peu l’impression d’avoir affaire à de l’autoédition plutôt qu’à une structure professionnelle. Toutefois rien qui ne va bloquer le plaisir de lecture.

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